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L’ARISTOS
Il y a quelques mois dans une revue
de jeunes paraissait cette étude. Bien que nous n’adhérions pas totalement au
nouvel humanisme qu’elle exalte nous tenons cependant à vous la présenter.
Car l’idéal qui s’y exprime mérite
d’être connu, étudié et surtout compris....
L’Aristos est un type d’homme. Le
type le plus parfait qu’on puisse concevoir.
Il est le héros et le saint à la
mesure des temps qui viennent.
On naît Aristos. C’est un privilège
qui n’échoit pas à tout le monde, mais qui pourtant n’est lié ni au rang
social, ni à la richesse matérielle.
On trouve des Aristos partout. Ils
sont les gardiens des précieux talents légués par leurs Pères ou reçus de leur
entourage. Ils peuvent les faire fructifier à force de labeur ou les laisser
rouiller par paresse.
Vous qui êtes appelés, songez-y.
L’Aristos est différent des hommes.
Il surprend par son équilibre
solide et par la tranquille sérénité qui rayonne de lui. Vis-à-vis de la vie,
il a une attitude pleine d’assurance : il l’affronte gravement tout en restant
joyeux et pur comme un enfant.
Il possède le sens de la grandeur.
Il est sobre et sait se détacher de
beaucoup de choses.
Il est énergique, courtois et
correct.
Moine, soldat, artiste.
Quel est son secret?
D’abord il aime l’ordre. L’ordre
dans la vie et dans l’esprit.
Chaque chose chez lui trouve
parfaitement sa place.
Il ne cherche pas. Il n’hésite pas.
Il ne perd jamais la tête.
Il ose et entreprend.
Chacun de ses actes, même le plus
humble, a pour lui un sens et une valeur, parce que ses actes sont dirigés vers
un but: un but qui absorbe toutes ses énergies.
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L’Aristos
croit en DIEU.
Pour lui,
Dieu est, dans le sens entier du mot :
"Son
SEIGNEUR. La plus haute Noblesse.
La Beauté
parfaite. L’absolue Bonté et Vérité.
Il est
l’origine et le terme de sa vie.
Grâce à
Lui, il a le droit de naître, de combattre, de mourir et puis d’entrer dans
l’éternité.
C’est
pourquoi il ne vit que "ad majorem Dei gloriam", pour la plus grande
gloire de Dieu, comme le grand Aristos qu’était Ignace de Loyola.
A peine a-t-il
fait cet acte de foi qu’il entre tout armé dans le féerique royaume du réel.
Sa saine et
sincère intelligence le met sur la voie d’un grand nombre de simples vérités
dont il se réjouit comme si elles étaient de réelles découvertes. A partir de
ce jour, il voit la relativité des choses, non par leur inutilité, ni leur
manque de valeur, mais leur valeur hiérarchique et la place que chacune doit
prendre dans le grand Tout de la création.
Il ne peut
être matérialiste, car il est placé au-dessus de la matière.
Il voit les
choses telles qu’elles sont.
Il leur
donne la place que la Nature... Dieu donc... leur a donné.
Ainsi il
découvre d’abord qu’il est HOMME.
Qu’il a une
place dans cette création : une place d’honneur.
Qu’il est
le Roi, le ROI DE LA CREATION, et qu’il l’est parce qu’il vit et pense.
Et il
découvre que tout est subordonné à son esprit.
Et à ce moment
seulement il jouit pleinement de tout ce dont il est entouré : la Nature... les
oiseaux... les nuages, la lune entre les arbres... l’eau, le sol de son village
natal... les livres et la musique.
Car il sait
que tout cela lui est destiné...
Il connaît
dès lors et sa valeur et sa dignité.
Il a posé
la base de sa conscience aristocratique, de son indépendance et de son
intangibilité.
Car il est
HOMME.
Mais il ne
voit pas seulement les CHOSES autour de lui.
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Il voit
aussi des Hommes.
Et dans son
aristocratique loyauté il voit dans les autres... l’HOMME, le roi de la
création, son semblable !
L’humble
mendiant du coin, la plus pure image de la misère humaine, devient pour lui :
"son" prochain, car le mendiant est HOMME aussi et doit retourner
vers Dieu.
Et voici
qu’infailliblement ‑ car il l’a dans le sang ‑ se réveille sa nature
aristocratique. Il découvre son DEVOIR, sa MISSION parmi les Hommes.
Intérieurement
il sentait déjà cette vocation quand il était jeune, mais il se taisait.
Il a pris
le temps d’apprécier les Hommes et de les juger à leur juste valeur.
Il a appris
à les connaître et les connaissant, à les aimer et parce qu’il les aime, à
considérer comme un honneur de leur venir en aide.
Désormais,
il n’hésite plus un instant à remercier celui à qui il a pu rendre service,
simplement parce qu’il lui a donné l’occasion de rendre service.
Car dans le
plus profond de son âme, il ne désire plus qu’une chose: devenir parfaitement
Homme et s’entraîner à atteindre son but éternel.
En lui grandit
aussi un respect illimité pour les autres.
Surtout
pour le faible et le malheureux, et aussi pour la Femme, qui est pour lui le
symbole de toute beauté et de toute pureté.
Mais le
respect ne croît pas seul, il y a aussi la fierté et le dédain pour tout ce qui
dégrade l’Homme et le détourne de sa grandiose mission.
L’Aristos
poursuit sa pensée... son horizon s’élargit.
Comment va-t-il
remplir sa mission ?
Il voit que
les Hommes sont organisés par la nature :
en Familles
en Peuples
Il voit que
tout est réglé et qu’il existe un ordre naturel des choses et des institutions
naturelles, INDISPENSABLES à qui veut atteindre l’épanouissement total de son
bien éternel : DIEU ; indispensables aussi à qui veut accomplir sa mission en
ce monde.
Sans
famille ou sans famille saine,
Sans
nation, ou sans nation saine,
Que de
désordre,
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Que
d’énergie perdue !
L’atmosphère
est viciée, et tout effort vers la Grandeur, la Beauté et la Vérité étouffé
dans l’oeuf.
A présent
il connaît son devoir, il connaît le terrain, il connaît aussi la voie.
La
sauvegarde de la famille ? donc d’abord SA famille et PAR ELLE, les autres.
La
sauvegarde des peuples ? donc d’abord SON peuple et, PAR LUI, les autres.
Pour
l’Aristos, la famille se prolonge au plus profond des temps.
Elle
n’existe pas seulement par les vivants, mais aussi par les morts et tous ceux
qui dans la suite des siècles naîtront et porteront son nom.
Tant de
générations l’ont précédé, et tant d’autres ‑ se dit-il ‑ le suivront.
Que de
richesses spirituelles il a héritées de ses ancêtres !
Qu’en a-t-il
conservé ?
Qu’en a-t-il
à transmettre à ses successeurs ?
Comment ne
pas admirer et respecter pareille institution ou perdre conscience de ses
responsabilités envers elle ?
Dès lors il
ne lui reste qu’à travailler, à se former, à se sacrifier pour que règne dans
sa famille cet esprit idéal qui permettra à chacun de ses membres de se
développer complètement. Car sa famille a également une mission propre. Elle
doit être un modèle.
Son PEUPLE,
lui aussi, plonge ses racines au plus profond de l’histoire et du temps.
Comme il
connaît l’histoire de sa race, il connaît aussi celle de son peuple.
Ce peuple,
il sait qu’il existe depuis l’époque lointaine où, pour la première fois, des
hommes ont peuplé les "bas pays aux bords de la mer". Il connaît les
défauts et les qualités de ce peuple et les dangers qui le menacent.
Et il sait
que la mission de son peuple a toujours été : D’ETRE LE GUIDE SPIRITUEL DU
MONDE.
Ainsi vit-il
dans la compagnie de tous les hommes qui l’ont précédé et plus que jamais de
tous ceux qui le suivront et de ceux qui l’entourent et l’aident à vivre.
Chaque
morceau de pain qu’il mange lui est acquis par le travail de la foule
innombrable des hommes qui prennent chacun leur place dans cette vaste société
que forme un peuple. Lui aussi y a sa place. Il le sait. Il est privilégié. Il
doit être un GUIDE.
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Ainsi
l’Aristos revient à lui-même lorsqu’il recherche les MOYENS d’accomplir cette
tâche.
Il sait
qu’il a un corps et un esprit : ‑ il sait penser, vouloir, sentir ‑ il est un
tout organique, indivisible et dans lequel plus qu’ailleurs doit régner
l’ordre.
Le corps y
est au service de l’esprit. L’esprit sera d’autant plus libre que le corps sera
plus dispos.
C’est
pourquoi il exerce son corps le mieux possible en l’endurcissant, en l’éduquant
et en prenant soin de lui. Il veille à ce que son développement soit harmonieux
et ne le détourne pas d’une soumission entière à l’esprit.
Car en lui,
tout est soumis à l’esprit, et dans son esprit, à l’intelligence, c’est à dire
à la pensée efficace.
L’Aristos
pense efficacement, c’est-à-dire systématiquement, ni trop ni trop peu. Jamais
i1 n’entreprend quelque chose qu’il ne peut entièrement justifier. "Un
animal n’agit pas contre son instinct, pourquoi un homme agirait-il contre son
intelligence ?"
Ensuite il
y a sa volonté, arme splendide qu’il mettra des années à forger et à rendre
exactement conforme à ses fins.
Cette
volonté doit être inflexible et réagir instinctivement sans une ombre
d’hésitation et sans crainte des conséquences, uniquement préoccupée du but.
Aussi ne doit il laisser passer aucune occasion de l’exercer et de l’endurcir.
Et la
dernière arme : sa sensibilité.
Il en
connaît la valeur comme stimulant de l’action. Il s’efforce de dominer et de
canaliser ses émotions afin qu’elles ne l’empêchent pas d’accomplir son devoir,
mais qu’elles l’entraînent sur le long chemin qu’il s’est tracé.
Puis il
passe à l’action.
Et le
combat qu’il livre est un combat pour la liberté, la liberté de faire ce qu’en
conscience il estime devoir faire, et cela malgré les autres et surtout malgré lui-même.
C’est une
lutte sans trêve ni repos, mais dont il sort marqué d’un cachet indélébile : la
noblesse de l’homme libre, de l’Aristos.
La première
vertu de l’Aristos est : la dignité qui s’exprime avant tout dans son sens de
l’honneur. "Mon honneur vaut plus que ma vie", dit-il, et par honneur
il entend l’image qu’il a rêvée de lui-même et qu’il ne veut à aucun prix
trahir. Cette dignité s’exprime aussi dans sa loyauté.
Il possède
un mépris inné de ce qui est faux.
Rien ne
l’offense plus que l’emploi des mots dont on ne comprend pas le sens ou que
l’on emploie mal à propos. Pour lui tout cela est déshonorant
Il ne ment
pas et il est avec tous tel qu’il est vraiment.
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Cette
dignité lui donne aussi son sérieux, sa finesse et son sens de la grandeur et
de l’honnêteté.
Il éprouve
comme une humiliation devant le travail mal fait ou la mesquinerie.
Sa seconde
vertu est : l’esprit d’abnégation. Il est indifférent à l’argent, insensible
aux honneurs, inaccessible à la crainte.
Il est
soldat dans l’âme.
Il a des
habitudes militaires. Il préfère rester debout qu’assis.
Il est
sobre, sobre dans sa tenue, sa nourriture et ses habitudes de vie.
Il a
horreur de tout ce qui est superflu.
Rien de
trop, pas même un mouvement.
Habitué à
être dur pour lui-même, il est à même de se donner tout entier à sa mission et
même de se sacrifier pour elle, lorsqu’elle le réclame.
Sa
troisième vertu est la courtoisie.
Autant il
est dur pour lui-même, autant il est patient et aimable pour les autres.
Il est
simple, mais d’une simplicité qui n’exclut pas la courtoisie ni la gentillesse.
Rien ne lui est plus agréable que de remonter le moral d’autrui.
Il est
plein de tact et de correction.
Car pour
lui, donner c’est recevoir. Il donne un peu de lui-même et en échange, il
acquiert la connaissance des hommes.
Il aime la
joie et le rire.
A travers
bien des vicissitudes, il tend lentement mais sûrement à réaliser en soi une
synthèse vivante de ce qu’ont apporté à son peuple vingt siècles de
civilisation chrétienne occidentale.
Mais
inévitablement vient l’instant où il s’aperçoit qu’il est isolé.
Il apprend
à se taire et dans sa solitude il perçoit plus distinctement que jamais l’ordre
impérieux : "Vivre pour servir ; pour servir : être ; pour être :
devenir".
Il connaît
alors le repos et la joie sereine d’une puissante vie intérieure.
Elle
rayonne de toute son attitude.
La plupart
des hommes ne le comprennent plus, mais tous, instinctivement l’imitent.
Moine,
Soldat, Aristos.
(TRADUIT DU
NEERLANDAIS)